L’ancien chef de l’État français, Nicolas Sarkozy a été condamné à un an de prison ferme pour avoir dépassé le plafond de dépenses de sa campagne présidentielle 2012 de plus de 20 millions d’euros.
Il n’y a pas eu de brouhaha, juste le silence ahuri d’une salle d’audience imaginant Nicolas Sarkozy porter un bracelet électronique à la cheville. L’ancien chef de l’État a été condamné jeudi 30 septembre à une peine d’un an de prison ferme – le maximum prévu par la loi à l’époque des faits – pour le financement illégal de sa campagne électorale de 2012, dans le cadre de l’affaire dite « Bygmalion ». La peine pourra être aménagée ab initio, c’est-à-dire convertie en détention à domicile sous résidence électronique. Pour l’ancien président, l’infamie reste la même : ses avocats ont déjà annoncé qu’ils feront appel.
Les autres prévenus, membres de l’équipe de campagne, prestataires privés, comptables, mandataire financier ou cadres de l’UMP, ont tous, également, été reconnus coupables ; leurs avocats affichant la mine sombre des délibérés sévères : le tribunal est allé au-delà des réquisitions du parquet. Le choix a été de frapper fort pour qu’un tel système, se résumant en la mise en place d’un système de sous-facturation ou de fausses factures visant à faire endosser par le parti les millions d’euros de dépenses de meetings, ne se reproduise plus à l’avenir. Ou que chacun y participant en connaisse désormais les conséquences…
20,208 millions d’euros de dépassement
La tenace présidente, Caroline Viguier, qui s’était montrée extrêmement pédagogue pendant le procès, a à nouveau pris le temps d’expliquer leurs peines aux condamnés, détaillant la répartition entre la prison ferme et la prison avec sursis, cette dernière sanction ne devenant effective qu’en cas de récidive. Elle n’a cependant pas eu à le faire avec Nicolas Sarkozy qui ne s’est pas déplacé, pas plus qu’il n’avait assisté à son procès, sauf le jour de son audition. Son avocat, Me Thierry Herzog, qui n’avait pas pu plaider pour des raisons de santé, était quant à lui bien présent.
Pour les juges, le montant total du dépassement du plafond de campagne s’élève à quelque 20,208 millions d’euros, la ligne rouge ayant été franchie dès le 31 mars 2012 lors du meeting de la porte de Versailles, soit trois semaines à peine après une première « note d’alerte » datée du 7 mars et prévenant le candidat des risques de dépassement. Dès le 19 mars, pourtant, il était décidé l’organisation de 21 nouveaux meetings électoraux entraînant, de fait, l’engagement de nouvelles dépenses.
Pour la justice, Nicolas Sarkozy, expérimenté et au fait de la législation, averti des risques qui existaient, a donc « permis la réalisation de prestations nouvelles et volontairement omis d’exercer un contrôle sur les dépenses ». Des prestations dont il « tirait parti » puisqu’« ayant pour finalité l’obtention des suffrages des électeurs ».
Amendes si enrichissement personnel
Bastien Millot, Guy Alvès, Sebastien Borivent et Franck Attal, de la société Bygmalion et Event et Cie, ont tous été condamnés à des peines allant de deux ans de prison avec sursis (Borivent) à trois ans de prison, dont 18 mois avec sursis (Millot), et à verser chacun 100 000 euros d’amende. Jérôme Lavrilleux, le directeur adjoint de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2012 qui, dos au mur, avait admis tout le système en direct sur BFMTV, a pour sa part été condamné à trois ans de prison, dont un avec sursis (le reste de la peine devant être exécuté sous le régime du bracelet électronique).
Les différentes personnalités qui composaient le staff de campagne ou les hautes instances de l’UMP ont quant à elles été condamnées des chefs de complicité de faux, complicité d’usage de faux ou complicité d’escroquerie à des peines mêlant là encore prison ferme et sursis, et à une période d’inéligibilité allant de trois à cinq ans pour celles et ceux exerçant un mandat électoral (Pierre Chassat et Fabienne Liadze ont depuis été élus à Levallois-Perret et Issy-les-Moulineaux).
Nicolas Sarkozy, lui, n’a été condamné qu’à un an de prison, le Code électoral ne prévoyant pas à l’époque de peines plus lourdes. La loi a été depuis revue. Si un candidat se risquait aujourd’hui à reproduire le même schéma, il encourrait 3 ans de prison et 45 000 euros d’amende.
Le Point