An exit poll predicting that the Labour Party led by Keir Starmer will win 410 seats in Britain's general election is projected onto BBC Broadcasting House in London on July 4, 2024. Britain's main opposition Labour party looks set for a landslide election win, exit polls indicated, ending 14 years of right-wing Conservative rule marked by financial austerity, Brexit division and scandal. (Photo by Oli SCARFF / AFP)

Le futur premier ministre britannique Keir Starmer promet un « renouveau national » pour le Royaume-Uni, après la victoire écrasante de son parti, qui a remporté au moins 367 sièges, selon des résultats partiels.

C’est la fin d’une succession de quatorze années de gouvernements conservateurs au Royaume-Uni. Selon des résultats partiels, le parti travailliste détiendra la majorité absolue dans le futur Parlement britannique à l’issue des élections législatives du jeudi 4 juillet.

Vers 4 h 30 locales (6 h 30 à Paris), le Labour avait sécurisé plus de 367 sièges, soit plus que les 326 sièges nécessaires pour obtenir la majorité absolue à la Chambre des communes et pouvoir former seul le futur gouvernement britannique.

Selon la dernière estimation de la BBC après l’annonce d’un tiers des résultats, le Labour remporterait au total 408 sièges sur les 650 de la Chambre des communes, soit un peu moins que le score historique de Tony Blair en 1997 (418), contre 136 sièges pour leurs rivaux, emmenés par l’actuel premier ministre, Rishi Sunak.

C’est donc Keir Starmer, 61 ans, un ancien avocat spécialiste des droits humains, qui sera chargé, vendredi, par le roi Charles III de former un gouvernement. M. Starmer, qui a ramené son parti au centre gauche depuis qu’il a pris la succession de Jeremy Corbyn à la tête du Labour, en 2020, a promis le retour de la « stabilité » et du « sérieux », avec une gestion des dépenses publiques rigoureuse.

« A tous ceux qui ont fait campagne pour le parti travailliste lors de ces élections, à tous ceux qui ont voté pour nous et qui ont fait confiance à notre nouveau parti travailliste, merci », a réagi Keir Starmer sur X dans un premier temps. « Les électeurs, ici et dans tout le pays, se sont exprimés et ils sont prêts au changement, à mettre fin à la politique spectacle pour revenir à la politique en tant que service rendu au public », a-t-il ajouté dans la nuit, dans un discours après sa réélection dans sa circonscription du nord de Londres.

Keir Starmer en meeting à Redditch, dans le centre de l’Angleterre, le 3 juillet 2024.

« Notre tâche n’est rien de moins que de renouveler les idées qui maintiennent l’unité de notre pays, un renouveau national », a-t-il déclaré dans un nouveau discours, prononcé alors que son parti venait de s’assurer une majorité absolue. « Je ne vous promets pas que cela sera facile », a-t-il ajouté. « Il ne suffit pas d’appuyer sur un bouton pour changer un pays. Cela demande un travail difficile, un travail patient, un travail déterminé. »

Les résultats définitifs de l’élection devraient être publiés au cours de la matinée de vendredi, mais il est déjà certain que l’issue du scrutin ouvre un nouveau chapitre de l’histoire politique du pays.

Selon les projections, les libéraux démocrates (centristes) se renforceraient avec 66 députés, redevenant la troisième force en présence. En revanche, les indépendantistes écossais du Scottish National party subiraient un sérieux revers avec seulement 10 circonscriptions remportées sur 57 en Ecosse.

Mais la surprise du scrutin vient surtout du parti anti-immigration et anti-système Reform UK : il gagnerait 4 sièges. « C’est énorme les gars », s’est réjoui Nigel Farage, 60 ans, dans une courte vidéo sur X après les premiers résultats, qui annonçaient davantage de sièges. Ce tribun va devenir député après sa huitième tentative. « C’est presque incroyable » a-t-il ajouté. Le clip était titré « la révolte contre l’establishement a commencé ».

Un score qui a de quoi donner des ailes à cet ancien député européen, fervent partisan du Brexit, qui entend faire de son parti la grande force d’opposition d’ici aux prochaines législatives de 2029. « C’est le début d’un grand mouvement », a déclaré le chef adjoint de Reform, David Bull.

Une défaite sanction inévitable pour Rishi Sunak et son camp.                               Les conservateurs avaient remporté 365 sièges il y a cinq ans, sous Boris Johnson, et le résultat des élections de ce 4 juillet sera ainsi le pire de la formation depuis le début du XXᵉ siècle.

Comme l’avaient prédit les sondages tout au long de la campagne, les conservateurs sont sanctionnés après quatorze années mouvementées qui ont laissé aux Britanniques un sentiment de déclin. Le Brexit a déchiré le pays et n’a pas rempli les promesses de ses partisans. L’envolée des prix des deux dernières années a appauvri les familles, plus nombreuses que jamais à dépendre des banques alimentaires pour se nourrir. Il faut attendre parfois des mois pour des rendez-vous médicaux dans le service public NHS, et les prisons risquent de manquer de places sous peu.

Dans une ambiance de luttes fratricides permanentes chez les conservateurs, les scandales politiques sous Boris Johnson et les errements budgétaires de Liz Truss, qui n’a tenu que quarante-neuf jours au pouvoir, ont fini d’exaspérer les électeurs. En vingt mois à Downing Street, leur successeur Rishi Sunak n’est jamais parvenu à redresser la barre dans l’opinion. Il a tenté un dernier coup de poker en convoquant ces élections en juillet sans attendre l’automne comme beaucoup le pensaient, mais sa campagne a été calamiteuse. L’ancien banquier d’affaires et ministre des finances de 44 ans a accumulé les bévues et semblé manquer de sens politique, écourtant sa présence aux célébrations du 80ᵉ anniversaire du Débarquement en Normandie et tardant à réagir aux soupçons de paris frauduleux dans son camp sur la date des élections. Face à la défaite inévitable, son camp en était réduit ces derniers jours à mettre en garde sur le risque d’une super majorité laissant le Labour sans contre-pouvoirs.

« Le parti travailliste a gagné ces élections législatives », a concédé Rishi Sunak dans la nuit. « Les Britanniques ont rendu un verdict clair ce soir (…) et j’assume la responsabilité » de cette défaite, a-t-il ajouté après avoir été réélu dans sa circonscription de Richmond, dans le nord de l’Angleterre. Si lui a été réélu, plusieurs de ses poids lourds ont été emportés par la vague de rejet qu’il a suscitée, comme les ministres de la défense, Grant Shapps, ou des relations avec le Parlement, Penny Mordaunt, qui était considérée comme une possible future cheffe de parti.

Le Brexit, sujet tabou de la campagne                                                               Pendant la campagne, Keir Starmer a mis en avant ses origines modestes – mère infirmière et père outilleur – contrastant avec son adversaire multimillionnaire. Peu charismatique mais déterminé, il promet de transformer le pays comme il a redressé le Labour, le recentrant sur le plan économique et luttant contre l’antisémitisme : méthodiquement, sans coup d’éclat ni état d’âme. Il assure vouloir relancer la croissance, redresser les services publics, renforcer les droits des travailleurs, réduire l’immigration et rapprocher le Royaume-Uni de l’Union européenne – sans revenir sur le Brexit, sujet tabou de la campagne. Neuf ans seulement après être entré en politique et quatre ans après avoir pris la tête du Labour, il sera confronté à une aspiration considérable au changement.

« Peu importe l’ampleur de la majorité », a assuré la numéro deux du Labour, Angela Rayner, sur ITV après la publication des sondages sortie des urnes. « Ce qui compte, c’est le mandat qu’aura Keir Starmer, que nous puissions aller de l’avant et tourner la page du chaos et du déclin que nous avons connus sous les conservateurs. »

Dès la semaine prochaine, Keir Starmer devrait faire ses premiers pas sur la scène internationale à l’occasion du sommet des 75 ans de l’OTAN à Washington. Il devrait dans l’ensemble poursuivre la politique étrangère britannique actuelle. Lors de son dernier déplacement de campagne mercredi, il a assuré que son gouvernement se mettrait immédiatement au travail, reconnaissant : « Nous ne bénéficierons d’aucune période de grâce. » Le Monde

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