Fin novembre et début décembre, les ventes des groupes électrogènes ont quadruplé par rapport à l’année 2021. En cause, la crainte de coupures hivernales.

Les Français se préparent. Face à l’incertitude de l’approvisionnement électrique cet hiver, Aimé Hoeffler, 61 ans, a comme de nombreux Français sauté le pas et investi dans un groupe électrogène pour alimenter les équipements « indispensables ». Pour 2 000 euros, un générateur diesel neuf de 5 000 watts installé dans son garage peut tourner pendant une dizaine d’heures avec un plein, explique ce retraité qui vit à Rohrbach-lès-Bitche (Moselle). « C’est de la pure prévision, de la pure prudence », reconnaît-il.

Face à la crise énergétique, provoquée par la guerre en Ukraine et aggravée par des problèmes de maintenance des réacteurs nucléaires, des coupures de courant programmées et ciblées pourraient survenir cet hiver en cas de surcharge du réseau électrique. Même si le gouvernement et les opérateurs essayent de rassurer la population, Aimé Hoeffler n’est pas seul à se préparer au pire. « Depuis la fin de l’été », les ventes de groupes électrogènes ont largement augmenté chez Castorama, « avec en particulier une très forte progression depuis les deux dernières semaines », indique à l’Agence France-Presse une porte-parole du groupe, qui a « commencé très tôt à s’organiser ».

Par rapport à 2021, les quantités vendues ont été multipliées par 2,5 ces quatre derniers mois et par 4 ces deux dernières semaines, a détaillé l’entreprise. Chez Aimé Hoeffler, le générateur ne pourra faire tourner que « l’indispensable » : congélateur, électroménager et « si possible » la pompe à chaleur électrique pour le chauffage.

Les produits « milieu de gamme » en quasi-rupture
Même son de cloche du côté de l’enseigne Mr.Bricolage. « En moins de trois mois, nous avons fait l’équivalent d’une année de vente », a affirmé le directeur commercial Hervé Onfray, soulignant que la demande est « plus importante dans les zones rurales et les petites agglomérations », « moins » dans « les grands centres urbains ». Selon lui, les magasins de bricolage voient arriver trois clientèles types. D’abord, des « foyers ruraux […] qui ont un besoin de dépannage et vont acheter des groupes électrogènes peu puissants pour faire fonctionner quelques petits appareils électroménagers ou de l’éclairage ».

Ensuite, des familles « qui ont peur de perdre leurs provisions alimentaires et veulent des appareils plus puissants, capables de faire fonctionner plusieurs appareils en même temps ». Enfin, « des petits commerçants inquiets pour la continuité de leur activité en cas de coupure, qui s’équipent en générateurs électriques puissants ».

Leur produit phare ? Les groupes électrogènes milieu de gamme – entre 450 et 599 euros – qui permettent de « brancher des réfrigérateurs, des congélateurs ou des fours », qui s’arrachent comme des petits pains. À tel point que « la demande est plus importante que l’offre, malgré notre anticipation », déplore Hervé Onfray. Voyant le vent tourner « dès juillet », Mr.Bricolage avait approvisionné ses magasins « pour l’équivalent d’un an de vente ». Mais « nous rencontrons déjà des difficultés d’approvisionnement avec nos fournisseurs », confie-t-il.

Des clients professionnels
À Plérin, près de Saint-Brieuc en Bretagne, « c’est la folie ». Chez le fabricant de groupes électrogènes industriels de haute capacité Gelec, « on a eu une explosion des commandes » dès fin août, avec une hausse de 80 % sur un an, rapporte le directeur Éric Lemoine. Le stock de quelque 400 machines, constitué dès fin 2021 pour pallier la hausse des prix, « fond » et « il ne nous en reste pratiquement plus » avant une nouvelle livraison ces prochains jours, détaille-t-il à l’AFP. Les délais d’attente s’allongent malgré le stock et la hausse de la production anticipée dès la fin de l’été.

La demande progresse notamment du côté des supermarchés, soucieux de préserver la chaîne du froid, mais également du côté de « beaucoup de petites PME qui, pour deux heures (de coupure), sont obligées d’arrêter leur activité totale pendant presque une journée, car les machines mettront beaucoup de temps à redémarrer », explique le directeur.

Le calcul est parfois vite fait : il cite l’exemple de ce restaurateur, pour qui investir 20 000 euros dans un groupe électrogène équivaut au coût d’une journée d’activité amputée par une coupure de courant. Face à la hausse de la demande, Gelec a embauché six nouveaux collaborateurs et va lancer des travaux pour agrandir son entrepôt de 500 m2.

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