Le premier ministre italien a pris acte, jeudi, de l’implosion de sa majorité la veille au Sénat et a remis sa démission au président.

Si l’Italie s’est réveillée, jeudi, sous le choc, après que La Ligue, Forza Italia et le Mouvement 5 étoiles aient, au Sénat, fait tomber le gouvernement de Mario Draghi dans une folle journée, le rituel démocratique de la crise politique s’est vite imposé. Jeudi, après un passage éclair à la chambre des députés, où le président du Conseil démissionnaire a parlé moins de 30 secondes, Mario Draghi s’est rendu au Quirinal pour confirmer sa démission, et celle de son gouvernement. Cette fois, le président de la République Sergio Mattarella en a pris acte, convoqué les présidents des chambres et prononcé leur dissolution.

Puis il s’est adressé aux Italiens, pour expliquer que faute de majorité alternative, il n’avait pas d’autre choix. Et que si Mario Draghi était désormais appelé à gérer les affaires courantes jusqu’à l’arrivée du prochain gouvernement, c’est avec un périmètre assez étendu pour qu’il puisse faire face aux différentes crises du moment, dont la crise sociale et sanitaire, et puisse continuer à mettre en œuvre le plan de relance. Enfin, le Conseil des ministres fixait dans la soirée au 25 septembre prochain la tenue des élections législatives anticipées. Soit sept mois avant la fin naturelle de la XVIIIe législature.

Tremblement de terre
Un délai extrêmement serré donc pour que le nouveau gouvernement, qui sera issu des urnes puisse – en deux mois à peine – boucler la loi budgétaire pour 2023, et éviter l’infamie de la loi provisoire qui empêcherait l’État d’engager des dépenses autres que celles relatives à son fonctionnement. Car si le Parlement nouvellement élu n’avait pas de majorité claire, la constitution du nouveau gouvernement pourrait prendre plusieurs semaines, et ne pas arriver avant fin octobre.

Le 25 septembre offre un délai à la fois long et très court. Car avec le dépôt des symboles des partis au plus tard le 14 août, celui du nom des candidats avec les signatures avant le 22 août, la campagne électorale s’annonce brève. D’autant que les vacances estivales commencent à peine, une période peu propice à l’intérêt des vacanciers pour la politique : ainsi en trois semaines tout au plus, les candidats devront se présenter à leurs électeurs et les débats de fond devront être posés. Des conditions qui risquent fort de polariser radicalement une campagne qui commence déjà à couteaux tirés, après dix-sept mois de cohabitation douloureuse entre des forces politiques qui ne partagent rien.

Mario Draghi venait à peine de constater sa défaite que la campagne commençait. Avec l’entrée en fanfare de Giorgia Meloni, la leader de Fratelli Italia, la seule dans l’opposition, que les sondages désignent comme première force politique du pays, et qui hier triomphait : « Les seuls gouvernements qui fonctionnent sont ceux qui ont une majorité cohérente avec une vision partagée. C’est ce que nous avons toujours affirmé et, malheureusement, l’histoire nous a donné raison ».

Campagne qui a aussi démarré avec son premier acte, la désignation des responsables de la chute du gouvernement italien le plus estimé depuis longtemps. Même si « pour ne pas laisser leurs empreintes digitales sur l’arme du Draghicide », comme le résumaient hier les commentateurs, un crime qui pourrait leur coûter cher au moment du vote, les deux leaders populistes avaient pris soin de ne pas voter. Matteo Salvini lui-même, pour ne pas s’exposer, avait fait exprimer la position de la Ligue par un autre sénateur. Et chacun d’accuser l’autre du crime. Mais de facto, la séquence des derniers jours est très claire : c’est le leader du M5S, Giuseppe Conte, qui a appuyé sur le détonateur en s’abstenant le premier de voter le plan d’aides de 23 milliards le 14 juillet, le premier à se détacher de la majorité. Et c’est la droite de gouvernement qui le 20 juillet portait le coup de grâce en imposant des exigences inacceptables pour Mario Draghi, dont un changement radical de programme, et en refusant de lui voter la confiance.

Responsabilité partagée

Une responsabilité du reste partagée par les deux composantes de la droite de gouvernement : c’est Matteo Salvini, le leader de la Ligue qui fut l’instigateur de la révolte. Mais plus surprenant, Silvio Berlusconi, président de Forza Italia, pourtant un soutien quasi sans faille à Mario Draghi durant les dix-sept mois du gouvernement, n’a opposé aucune résistance au leader populiste. La coalition de droite, composée de Fratelli d’Italia, La Ligue et Forza Italia, ayant cette fois une chance objective de revenir au pouvoir, Silvio Berlusconi qui, à 86 ans, dit vouloir redescendre dans l’arène, a voulu maintenir, coûte que coûte, l’unité de la droite pour qu’elle puisse saisir sa chance.

Alors que l’adhésion ou non au gouvernement Draghi a clivé toutes les forces politiques de la majorité, on s’attend à voir rapidement des répliques violentes de ce tremblement de terre sur tout l’échiquier.

Le Figaro

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