Le préfet de police s’est expliqué devant le Sénat, jeudi matin, juste avant la FFF qui a révélé que les images de vidéosurveillance avaient été détruites.
« C’est à l’évidence un échec. » Le préfet de police Didier Lallement a pris ses responsabilités, jeudi 9 juin, devant le Sénat, alors qu’il était interrogé sur la gestion policière autour de la finale de la Ligue des champions Real Madrid-Liverpool le 28 mai dernier, au Stade de France. En mentionnant les personnes « bousculées ou agressées » et « l’image ébranlée » de la France, il a confié : « C’est une blessure pour moi. » Par ailleurs, le préfet de police a dit « assumer complètement » le chiffre de 30 000 à 40 000 personnes situées devant le Stade de France sans billet valide, tout en soulignant qu’il n’a « jamais prétendu que ce chiffre était parfaitement juste ».
Cette estimation, reprise par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, est contestée par les Britanniques, la presse et de nombreux observateurs. Gérald Darmanin avait expliqué après la rencontre sportive que de « 30 000 à 40 000 supporteurs anglais se sont retrouvés au Stade de France, soit sans billet, soit avec des billets falsifiés ».
Didier Lallement exprime ses « regrets sincères »
Didier Lallement s’est néanmoins satisfait que « le match se tienne et surtout qu’il n’y ait aucun blessé grave et aucun mort ». Le préfet a dit ses « regrets sincères » aux supporteurs britanniques et espagnols, et les a encouragés à porter plainte, ce qui est possible depuis lundi en téléchargeant un formulaire sur le site de l’ambassade de France au Royaume-Uni.
« Les forces de sécurité intérieure n’étaient pas chargées du contrôle des billets » au niveau du préfiltrage à la sortie des transports en commun, a-t-il relevé, soulignant « la responsabilité de l’organisateur ». « Avec l’arrivée tardive et massive, ce contrôle s’est embolisé » à la sortie du RER D, a-t-il poursuivi, regrettant que la préfecture de police n’ait pas disposé d’« informations précises » concernant les supporteurs de Liverpool.
Concernant l’usage de gaz lacrymogène utilisé par les forces de l’ordre sur le parvis du stade, le préfet a répété à deux reprises qu’il s’agissait du « seul moyen policier pour faire reculer une foule, sauf à la charger », ce qui aurait été une « erreur grave ». Il s’est dit « désolé » pour les « gens de bonne foi, il en existe », qui ont respiré ces gaz, mais, selon lui, « la doctrine du maintien de l’ordre » n’est pas en cause. Il a concédé « un problème de manœuvres ». « Les décisions prises » ont permis de préserver « l’intégrité physique des personnes et la tenue du match », a-t-il conclu.
La FFF accuse la délinquance et la RATP
De son côté, la Fédération française de football (FFF) a pointé la délinquance et l’absence de coordination avec la RATP parmi les raisons majeures ayant entraîné les incidents au Stade de France lors de son audition au Sénat. « Nous n’étions pas préparés à un tel afflux de délinquants », a expliqué le directeur des affaires institutionnelles de la FFF, Erwan Le Prévost. Il a cité « des comportements hors norme, des gens rentrés à travers des restaurants », d’autres qui « ont cassé la grille d’une école pour rentrer, des gens entrés par le chantier d’une passerelle… »
Selon lui, le manque d’information de la RATP a aussi contribué à l’engorgement aux portes du stade. « Si nous avions eu les informations en temps réel du détournement des flux du RER B (en partie en grève) vers le RER D, nous aurions pu repenser notre dispositif en début d’après-midi. La préfecture non plus n’avait pas eu l’information », a-t-il ajouté.
L’audition de la FFF a permis d’apprendre que les images de vidéosurveillance des violences autour du stade n’ont pas été conservées. « C’est la loi », a précisé à l’AFP le président de la commission de la culture, Laurent Lafon. « Nous sommes surpris, le préfet a saisi la justice très rapidement, il y a eu largement le temps de saisir (ces images), il faut qu’on comprenne ce qui s’est passé. » « S’il advenait qu’elles n’ont pas été conservées, cela poserait un grave problème », a ajouté le président de la commission des lois, François-Noël Buffet, qui coprésidait l’audition. AFP